Séchage du foin en granges vers une agriculture durable
France
Introduction
Jean-Noël Landemaine reprend l’exploitation de ses parents en 2003, conduite en agriculture conventionnelle sur 100Ha. Sont produits alors 15Ha de céréales, 25 Ha de maïs ensilage et 425 000L de lait. Rapidement, Jean-Noël prend conscience du changement climatique et du déclin de la biodiversité ; il ne peut plus continuer à exercer son métier tel que ses parents l’exerçaient.
Cette remise en question concernant la durabilité de son activité invite Jean-Noël à faire évoluer son système vers le tout-à-l’herbe et le renvoie à une réflexion globale sur son mode de production, ce qui l’amène à la mise en place du séchage du foin en grange. Cette méthode consiste à sécher les fourrages à un stade précoce et sur une courte durée. Ainsi récolté, encore humide, le foin conserve tous ses nutriments.
Le séchoir permet de récupérer de l’air chaud sous toiture, la chaleur est récupérée par un ventilateur et soufflée sur le tas de foin stocké en vrac dans le bâtiment. Selon Jean-Noël Landemaine, « Il s’agissait de la meilleure issue pour sortir de tout ce que je ne pouvais plus accepter. »
Présentation du projet
Lorsque Jean-Noël Landemaine reprend la ferme de ses parents avec sa femme au lieu-dit Louverné à Chantrigné, commune du nord du département de la Mayenne, il est décidé à rompre avec le système transmis par ses parents et relayé dans les centres de formation. Le système apparu après-guerre avec le maïs ensilé à destination de l’alimentation des animaux est remis en question et disparait pour laisser place au système tout-à-l’herbe.
Sa sensibilité à l’environnement ainsi que l’attente grandissante des consommateurs sur des produits issus d’une agriculture plus durable sont ses principales motivations pour aller vers une agriculture plus durable malgré la peur du changement.
En transition vers une agriculture plus durable, le séchage de foin en grange conventionnel dans un premier temps permet de montrer un système durable pour la nouvelle génération. Il démontre que l’on peut gagner en qualité de travail, en préservation de l’environnement tout en maintenant une rentabilité économique pour l’exploitation. Il s’agit d’un tremplin vers une conversion en agriculture biologique qui permettra d’améliorer :
– la qualité de l’eau en limitant le lessivage et en diminuant les produits phytosanitaires
– le bilan carbone de son exploitation en diminuant la consommation de fioul, de déchets plastiques et en supprimant l’importation de soja par bateau. Le foin retenant mieux ses nutriments avec cette nouvelle méthode permet de maintenir les génisses en meilleure santé et, en prime, diminuer les frais vétérinaires. Les exploitants deviennent également plus autonomes pour la bonne alimentation de leurs animaux.
Pour réaliser ce projet, la première étape a consisté à implanter des prairies pour ensuite diminuer la part de maïs ensilage au profit de l’enrubannage. Ensuite, les travaux pour la construction du séchoir d’une superficie de 1 000m² ainsi que la pose de la griffe à fourrage ont pu démarrer au courant 2019 pour lancer l’activité de séchage en 2020. Ce projet intègre également un déshumidificateur pour permettre de retirer l’air avant de le faire passer dans le ventilateur et ainsi envoyer un air sec sous le foin, même par temps de pluie. L’eau d’évaporation de la plante sera récupérée pour donner à boire aux animaux. Cette révision du système s’accompagne également d’un programme de replantation de haies sur la ferme. L’ensemble de ces restructurations le conduisent à l’obtention de la certification en agriculture biologique en 2020. Et Jean-Noël Landemaine ne s’arrête pas là, constatant la diminution de son bilan carbone sur sa ferme, il pousse la réflexion jusqu’au marché du carbone et créé une association dans le but de rémunérer les agriculteurs pour leurs pratiques vertueuses et financer la transition écologique. Son souhait aujourd’hui est de témoigner de son expérience auprès de jeunes en centre de formation pour accompagner le changement.
L’investissement global pour la réalisation du séchoir était très important pour l’exploitation donc Jean-Noël Landemaine est allé frapper aux portes des banques. Afin de rassurer les investisseurs et limiter l’emprunt bancaire, il a sollicité le GAL Haute Mayenne pour l’accompagner dans le montage du dossier de demande de subvention LEADER. Ici, le soutien financier européen a été un vrai levier pour concrétiser ce projet.
Le caractère emblématique du projet
Le projet répond pleinement à la stratégie du GAL Haute Mayenne qui vise à développer une agriculture économiquement viable tout en contribuant aux grands enjeux environnementaux. Avec ce projet, le défi du couple Landemaine a bien été de conjuguer l’équilibre économique de l’exploitation et le virage vers une agriculture plus durable.
Le séchoir est une technique présente dans les zones de montagne par le biais de toutes les AOC fromage (importance du foin pour les fromagers). Ainsi, la Suisse et l’Autriche ont été les pays pionniers sur cette technique, il en ressort une qualité certaine du cadre de vie : des prairies plutôt que des champs cultivés, pas de pesticides…
La technique du séchage en granges est encore peu diffusée en Mayenne, et particulièrement dans le Nord Mayenne. Le déshumidificateur intégré dans le séchoir ici présenté est la formule la plus en pointe de cette technique.
Environ 85% des systèmes avec séchoir sont implantés dans des exploitations certifiées en agriculture biologique, et c’est donc une particularité de ce projet que de le mettre en place sur un système conventionnel au départ.
Le projet de séchage du foin en granges est, comme le démontre Jean-Noël Landemaine, transposable dans toutes les fermes et s’adapte sur tous les territoires. Le déploiement de ce système est d’ailleurs un des objectifs de l’agriculteur.
Photos
GAEC de Louverné, Jean-Noël Landemaine et Marion Gardrat
Haute Mayenne
Pays de La Loire